ARTICLE 04 / Première expérimentation pédagogique de la RV avec les élèves de Pierrick - Arts Plastiques / Académie de Normandie

ARTICLE 04 / Première expérimentation pédagogique de la RV avec les élèves de Pierrick

, par Jean Noel, Pierrick Brissier, pierrick.brissier

Enseignant d’arts plastiques concerné par cette première expérimentation : Pierrick Brissier.

  • pierrick.brissier@ac-normandie.fr [Enseignant dans un établissement scolaire classé REP dans l’ORNE / Interlocuteur Académique de Caen pour le Numérique de 2002 à 2022 / Formateur / Webmestre / et dorénavant membre du pôle de compétence numérique académique de Normandie]

Quelques élèves de troisième se sont emparés d’un projet dont l’incitation était la suivante : "Le fantastique fait irruption dans le réel"


A une exception près (concernant l’incitation que je maintiens encore au collège), ma façon de travailler avec les classes de troisième est globalement similaire à la pratique d’atelier que je pouvais mettre en œuvre lorsque je travaillais au Lycée. Cherchant à mettre les élèves en situation d’autonomie progressivement depuis la sixième, ma démarche pédagogique a aussi pour objectif d’établir (maintenir ?) une continuité entre le cycle 4 et la seconde. (Supprimer le "gap", retirer un pallier, éviter une rupture).

Tous mes élèves d’une même classe ont certes une incitation commune en troisième mais les pratiques artistiques sont ouvertes, perméables, donc parfois hybrides. Pour cela, ils peuvent pratiquer en gravure, en sculpture, en photomontage avec un ordinateur ou un smartphone, réaliser des courts métrages audiovisuels commencés en classe durant les cours, continués dans la cour au lieu d’aller en permanence et finalisés (par exemple) en ville durant leur temps libre... Il y a trois ordinateurs, une vingtaine d’APN, mais je mets également à disposition deux casques METAQUEST2 (= OCULUS QUEST 2) pour mes élèves de troisième. Dans ces conditions, bien sûr, il n’y a que deux élèves qui peuvent l’utiliser simultanément dans la classe ou le couloir. Néanmoins, deux casques c’est mieux qu’un parce qu’il est alors possible de travailler en binôme, collaborativement.


Pour continuer la rédaction de cet article je vais juste copier/coller le travail réflexif que j’ai demandé à l’une de mes élèves [Wissal] à l’issue de sa pratique et de cette découverte. NB > ces mots sont les siens, j’ai juste pris la peine de corriger quelques coquilles...


  • Dans l’optique de réaliser un projet artistique, nous avons, moi et Manon, utilisé le casque VR (réalité virtuelle) Oculus Quest 2, qui nous a permis d’obtenir une image 3D, dans le thème donné par l’enseignant : « Le fantastique fait irruption dans le réel ». Ce thème nous a inspiré, ce qui nous a permis de réaliser une image dans laquelle il y a, en arrière plan, un portail que l’on peut appeler « portail dimensionnel » duquel sortent des « monstres » affreux et effrayants. Au premier plan, nous pouvons apercevoir un livre ouvert qui « perd » ses pages : celles-ci nous indiquent les différentes étapes d’apparitions de ces monstres et le portail. Il y avait également de dessiné, plusieurs livres qui nous montrent que la personne qui est face à cet événement et qui aperçoit ces monstres est un grand lecteur de romans fantastiques et de thrillers. Par ailleurs, le portail ainsi que les monstres sont « emprisonnés » dans une cage, faite avec des lignes en foudre/électricité blanches. Par ces mêmes lignes, sont reliés les livres avec les pages qui montrent les différentes étapes d’apparitions de ce phénomène surnaturel, et au dessus de cette « cage » est inscrit « reality » (avec des écriture transparentes dans lesquelles une ligne violette est en mouvement) qui nous montrent ce que voit la personne.
    Cette image nous fait donc hésiter entre le surnaturel avec ce que pourrait voir le lecteur (la personne, le spectateur) et le réel, avec tous les livres qui nous montrent qu’il est possible que cette personne fait face à des hallucinations, à force de lire des livres de genre fantastique : le fantastique est cette hésitation entre le réel et le surnaturel.

    Nous pouvons maintenant nous interroger sur ce casque, qui nous a permis de réaliser ce projet artistique : quels sont ses points positifs et négatifs (selon moi) ? Les paragraphes suivants aborderont, de façon générale, les avantages et les inconvénients de ce casque appelé Oculus Quest 2, et plus précisément l’application (MultiBrush) que nous avons utilisée…

    La mousse du casque qui est en contact avec la peau est protégée par une couverture souple en silicone, c’est hygiénique, nettoyable après chaque utilisation et agréable. Parfois, avec le port du masque en papier sur le visage, il y avait un peu de buée, c’était dommage car c’était parfois flou, il fallait alors nettoyer les lentilles. Globalement ce casque est très agréable.

  • Tout d’abord, après l’avoir allumé, ce qui est d’ailleurs une étape facile et rapide, et après avoir défini le guardian, qui sera notre zone d’activité que l’on ne doit pas dépasser, nous entrons directement dans un endroit, au choix (cet environnement est un peu comme notre maison). Ensuite, nous pouvons accéder à des applications telles que des jeux... Mais celle que nous avons toujours utilisée n’est pas un jeu, c’est : Multibrush. Cette application nous a permis de réaliser des images en 3D. Jusque là, j’ai trouvé ce processus assez simple et assez rapide, il n’y avait pas de bugs… Néanmoins, parfois, pour le guardian, il pouvait nous arriver de le redéfinir car lors d’une utilisation précédente, il se pouvait que l’utilisateur ait changé de place ce qui peut s’avérer un peu long au début.
  • Multibrush est une application avec un libre choix d’outils, de couleurs, de pinceaux… Nous pouvons donc représenter différents matériaux, aspects, états, telles que la fumée, le feu, la foudre etc. De ce fait, nous avons l’embarras du choix pour réaliser notre production. Nonobstant, je trouve ça compliqué lorsque l’on utilise la gomme pour effacer, par exemple, juste une petite partie de notre dessin (comme une gomme réelle) car la gomme efface directement l’entièreté de cette partie. Heureusement, nous pouvons modifier l’épaisseur de chaque outil (y compris la gomme) ce qui nous permet d’être plus précis, donc nous pouvons faire moins d’erreurs.
  • Par ailleurs, je trouve qu’il serait très bien d’avoir un outil qui permettrait de remplir une surface d’une certaine couleur sans pour autant la colorier : cela nous permettrait de gagner beaucoup de temps, car je prenais du temps à les remplir même en dézoomant. De plus, je dépassais à quelques endroits (même si j’utilisais les patrons et zoomais parfois) et je laissais des endroits sans couleur.
  • En outre, j’ai trouvé cela plutôt compliqué de dessiner en 3D surtout des personnages non stéréotypés et j’aurais aimé pouvoir faire des croquis au préalable, cela rendrait le travail beaucoup plus précis et un rendu bien meilleur. Premièrement, nous avons commencé par créer le portail en utilisant un outil qui permet de faire des sortes de longs fils d’ADN de toutes les couleurs et nous avons fait une sorte de spirale pour que le portail soit circulaire. D’ailleurs, ces fils étaient en mouvement. Deuxièmement, pour les monstres nous avons utilisé des patrons et nous avons colorié par dessus, puis dessiné les éléments du visage (les yeux, la bouche, etc) en rajoutant des cicatrices et en rendant ces éléments « monstrueux » (grand sourire diabolique, grands yeux violets,...). Aussi, autour des des monstres, nous avons utilisé des outils permettant de réaliser de la fumée, des bulles,… Ensuite, pour les livres, nous avons utilisé un outil qui permettait de dessiner des lignes avec du volume et nous l’avons combiné avec l’outil « règle » pour réaliser des rectangles (droit) ou plutôt des pavés droits et en utilisant des feutres/crayons pour écrire les titres et dessiner une page de garde (avec une illustration en rapport avec le titre). Enfin, pour relier les différents éléments (les livres et le livre expliquant les différentes étapes d’apparitions, qui est relié à ses pages détachées, sont tous reliés à un autre mini portail qui lui même est relié à la cage) nous avons utilisé un outil qui nous permet de faire apparaître des lignes d’électricité/ de foudre en mouvement (le mini portail dimensionnel a été fait avec ce même outil).
  • Pour ce qui est du support, nous n’en n’avions pas vraiment, nous dessinions dans le « vide » la plupart du temps. Toutefois, parfois, notamment pour les formes bien précises, nous utilisions un outil que l’on peut appeler « patron », ce qui nous permettait d’obtenir des ellipsoïdes pour la tête des monstres ou leurs corps par exemple, en coloriant dessus. Ce qui diffère grandement des feuilles de papier de dessin ou des toiles des tableaux, dans lesquels nos crayons/outils, ont un contact direct !
  • Le vide de la salle d’arts plastiques n’est pas le même que le vide du casque. En effet, lorsque nous utilisions le casque, nous étions comme dans une nouvelle dimension, qui nous fait oublier la vrai vie et donc la salle d’art, car même si nous nous situons dans le même endroit, ce que nous voyions de nos yeux est totalement diffèrent de ce qui se passe réellement. Toutefois, en appuyant deux fois sur le côté du casque, nous pouvons apercevoir notre vrai environnement, mais en noir et blanc.
  • Ce que j’ai également trouvé incroyable, c’est l’échelle de la création, ainsi que ce qui va avec, l’échelle du spectateur. Effectivement, nous pouvons parfaitement varier cette échelle, de la taille la plus petite, à la plus grande, de la taille d’un humain, d’un éléphant, d’un dinosaure, et toutes sortes d’autres créatures, de différentes tailles, opposées. Cela peut nous aider à être plus précis (en zoomant) ou au contraire, en dézoomant pour faire une création en plus grande dimension, rapidement, mais moins précisément. En outre, puisque cette échelle est conservée malgré la déconnexion du casque, lorsque un utilisateur se reconnecte et ouvre la création, il peut tout de suite avoir un effet de surprise, si nous arrangions l’échelle de façon spéciale (en zoomant par exemple en face d’un point de vue effrayant, surprenant). Nous pouvions nous déplacer de deux façons différentes, soit en « marchant », soit en utilisant l’outil avec deux pas représentés, qui nous permettait de localiser une place et d’y accéder instantanément.
  • Avec Manon, nous nous partagions chacune la partie du travail à réaliser et nous communiquions nos idées grâce au microphone intégré du casque, même si nous ne nous voyions pas et que nous étions éloignées l’une de l’autre. Toutefois, nous pouvions en temps réel voir nos positions (où l’on se situe), car nous pouvons percevoir nos casques blancs respectifs, avec son nom (Jean ou Maryse). Avant chaque cours, nous faisions le point sur notre travail et nous donnions des idées même si parfois, cela arrivait instantanément, lorsque nous dessinions. Pour nous permettre de travailler en collaboration, nous devions juste créer une « room » avec notre mot de passe pour que d’autres personnes ne puissent pas venir nous déranger.
  • J’ai constaté de nombreuses différences entre le réel et le virtuel mais également quelques points communs. Tout d’abord, l’environnement était très différent ! Entre la classe avec les élèves, l’ambiance, les activités… et le casque virtuel dans lequel nous avons choisi un environnement semblable à celui de l’univers, sombre, insonore, avec une ambiance pesante…Toutefois, nous étions dans un seul et même lieu, la classe d’arts plastiques. Ensuite, pour ce qui est de notre création, nous n’aurions pas pu la réaliser avec un autre support tel que le papier, car, évidemment, les effets spéciaux que nous avons réalisés ne sont réalisables que sur Multibrush, ou alors, avec une application de graphisme (que l’on peut utiliser via une tablette) telle que Procreate par exemple.
  • Pour ce qui est de l’espace, personnellement, au vu de notre création, je considère que nous sculptons et que nous dessinons en même temps, car, par définition, dessiner signifie représenter quelqu’un, quelque chose par un dessin, en tracer, en reproduire la forme, les contours ou les volumes mais en 2D. Et sculpter, c’est créer une œuvre d’art en trois dimensions par tout procédé : on constate donc que les deux correspondent à ce que nous avons réalisé.
  • Pour conclure, puisque c’est la première fois que nous utilisions cette application appelée Multibrush, je pense que nous ignorons encore de nombreux outils, de nombreuses techniques et d’autres possibilités car nous ne l’avons pas encore exploitée/testée complètement. Mais de façon générale, il manquait malheureusement quelques outils et bien sûr notre expérience personnelle, en art/dessin pour réaliser de bonnes images en 3D car les dessins en 3D sont plus compliqués que ceux en 2D. ( Ce que l’on dessine sur les carnets, avec des feuilles par exemple, même si les outils de cette application nous aident grandement). De surcroît, je trouve ce concept extraordinaire ! Lorsque nous étions à « l’intérieur » du casque, nous avions presque l’impression d’être dans un autre endroit, ce fut une très belle expérience.
Wissal.

Reality


Souvenirs


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Rime est une autre élève de troisième qui a aussi utilisé la VR pour aborder la citation : "Le fantastique fait irruption dans le réel".

  • Voici la note d’intention de Rime concernant son projet :

    " A travers mes peurs enfantines, j’ai voulu illustrer que le fantastique aussi imaginaire qu’il puisse être, n’est jamais très loin, ou du moins n’est pas à dissocier, de la réalité. Petite, les portes entr’ouvertes à travers lesquelles nous ne pouvons rien percevoir m’ont toujours effrayées et intriguées. Elles nous mettent dans une situation de désavantage. Je me suis toujours imaginée que toutes sortes de créatures étranges et effrayantes pouvaient surgir de l’obscurité. "






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