#11 GLITCH - Arts Plastiques / Académie de Normandie

#11 GLITCH

, par Mael Judic

*|MC:SUBJECT|*

#11 GLITCH

Pôle de compétences numériques arts plastiques
Académie de Normandie
Partager Partager
Tweeter Tweeter
Transférer Transférer
PARTIE 2 -  L’oeuvre de Miguel Chevalier articulée aux notions plastiques suivantes : 
  • Outil
  • Matérialité 
  • Couleur
  • Support
  • Temps
  • Forme
MIGUEL CHEVALIER / OUTIL

La simulation source de création

La technique numérique induit un mode de figuration basé sur la simulation. L’œuvre propose une simulation du réel par modèles logico-mathématiques interposés.

C'est en s'inspirant des travaux de botanistes sur la simulation de la croissance des plantes que Miguel Chevalier développe un herbier composé de graines virtuelles. Puis, comme un paysagiste, l'artiste crée avec ces graines un jardin virtuel qui va se transformer dans le temps. Il imagine trois générations différentes de fleurs virtuelles : les Sur-Natures en 2004 avec dix-huit graines virtuelles, puis les Fractal Flowers en 2008  avec quatre-vingt-dix graines, et les Trans-Natures en 2012 avec une centaine de graines.

Sur-Natures Vue de l’installation virtuelle générative et interactive

Hybridations et techniques numériques

Miguel Chevalier a voulu très tôt développer une pratique entre la peinture, la vidéo et l’ordinateur.

Sa pratique basée sur la peinture sur diapositive va changer grâce aux outils numériques et particulièrement grâce à la numérisation numérique. De 1982 à 1983, il numérise les photographies pour travailler sur les variations et la colorimétrie des images pour créer des «photo-peintures».

L'explosion des jeux vidéo dans les années 90 et l'apparition d'ordinateurs plus puissants a amené Miguel Chevalier à explorer les images animées à partir des modèles 3D et à imaginer une « nature vivante ».

Le rapport à l'écran dans lequel était figée l'image numérique se voit changé par l'apparition des vidéoprojecteurs. L’œuvre peut alors changer d'échelle et prendre place dans l'espace urbain tout en s'adaptant à ces espaces comme dans Sur-Natures en 2007

La rematérialisation, recherche de matérialité

À plusieurs moments de sa pratique artistique, Miguel Chevalier tente de rendre son art matériel. L'aspect financier est l'un des facteurs premiers puisque son art immatériel n'a pas de valeur monétaire. Les impressions de ses images numériques sont donc ses premières tentatives de ressources financières.

Il essaye aussi de programmer des robots pour peindre ses images avec des bras robotisés dans la mouvance des artistes comme Harold Cohen (robot AARON construit dans les années 70).

En 2007-2008, la démocratisation des imprimantes 3D permet à Miguel Chevalier de matérialiser en volume ses graines virtuelles et d'en faire des sculptures.

Harold Cohen avec une machine à peindre à Boston en 1995

L'intelligence artificielle, la création en devenir

Avec les Fractal Flowers, les fleurs peuvent muter et s’hybrider avec d'autres. L'algorithme crée lui-même de nouvelles espèces. Les œuvres ne sont plus en boucle comme dans la vidéo : « Le digital permet de créer des œuvres qui s'auto-génèrent » et dans lesquelles le hasard comme dans la nature prend sa place.

MIGUEL CHEVALIER / COULEUR
La peinture lumière
 
Déjà avec les Serres Baroque & classique, l‘espace artificiel est une architecture de lumière. La couleur, chez Miguel Chevalier, est lumière. Le numérique et les pixels sont assimilables au pointillisme de Seurat. C’est la diffraction de la lumière, la multiplicité, la juxtaposition et la superposition des points ou des pixels qui font naître les formes.
 
La couleur matérielle

En peinture, elle est basée sur les couleurs primaires, leurs mélanges et complémentarités.
Rouge, Jaune, Bleu.
 
La couleur imprimée en mode quadrichromie, repose sur le C.M.J.N.
Cyan, Magenta, Jaune, Noir, selon un procédé de couches ou filtres superposés successivement.
Avec la naissance des écrans, les couleurs de bases, R.V.B.
Rouge, Vert, Bleu, désignent un système de traitement optique, d’affichage électronique.
 
C’est sur cette base nouvelle de codage numérique des couleurs que Miguel Chevalier expérimente un principe artistique au début des années 80. Entre peinture, photographie  et vidéo, c’est l’entre-deux qui l’intéresse et qu’il explore.
 
Cet entre-deux, c’est la couleur/lumière établie par les écrans et les projections. Dans les Fractal Flower, Miguel Chevalier joue à l’infini des formes et des couleurs. Les couleurs sont en mouvement et la variété des jardins de lumière est expansive, comme une nature qui ne peut être empêchée de proliférer et offre aux regards ce qu’elle a de plus lumineux, de plus coloré.
 
Dans Extra-Naturel, c’est d’immersion qu’il s’agit. Là encore, les couleurs dominent et enveloppent. La référence suggérée par Miguel Chevalier se veut, comme dans les années 80 avec Seurat, toujours picturale. On approche des années 2020, comme Claude Monet qui voulait que l’on soit «dans» la peinture avec ses Nymphéas surdimensionnées enveloppant le spectateur, Chevalier s’y réfère et poursuit la démarche initiée, la poussant à son paroxysme. 
BAROQUE & CLASSIQUE 1987  Installation mixed media  Centre d'art contemporain, Belfort, France
BAROQUE & CLASSIQUE 1987  Installation mixed media  Centre d'art contemporain, Belfort, France
MIGUEL CHEVALIER / SUPPORT
Le support fait souvent référence à une surface de travail, sur laquelle sont déposés des matériaux comme des pigments par exemple, mais son utilisation n'est pas toujours neutre.

« Je réalise des œuvres in situ qui revisitent, par l’art numérique, l’histoire et l’architecture des lieux. L'immersion apporte au spectateur une expérience inédite. Elle enrichit l’univers de nos sens et de l’émotivité. » 

Miguel Chevalier entretien du 07/12/18 pour CNC

 
Dans l'oeuvre Voûtes Célestes, l’artiste propose une suite de cartes du ciel (elles sont imaginaires, évolutives, interactives, lumineuses…) projetées sur les voûtes du chœur, de la nef centrale, de la croisée du transept et des deux transepts de l'église Saint-Eustache.

La lumière de l’installation vient transformer, sublimer le réseau des voûtes de l’église. Nous sommes comme engloutis par ce support où viennent se croiser, se mélanger, « l’architecture » et le « céleste », Miguel Chevalier offre une immersion aussi bien visuelle que spirituelle, le virtuel offrant une constante transformation du support.

Ils ne font plus qu’un, et de cette union, nous nous retrouvons face à un organisme qui crée une sensation d'infini. Cohabitation, évolution, élévation, matérialité, mouvement, trompe-l’œil… cette liste non exhaustive vient donner un nouveau sens à l'architecture ; le support devient ainsi actif et fait corps avec le matériau.
Voûtes Célestes, 2016, installation de réalité virtuelle générative et interactive, Nuit Blanche 2016, Église Saint-Eustache, Paris, France
MIGUEL CHEVALIER / TEMPS
Les Fractal Flowers s’inscrivent dans une démarche initiée par Miguel Chevalier au début des années 2000. Cette série réunit une variété de réalisations et interroge le temps dans le monde végétal et l’imagerie numérique. Miguel Chevalier crée des plantes de différentes couleurs qui se développent aléatoirement suivant un principe génératif et interactif, dit GVR (Generative Virtual Reality), avec un logiciel conçu par Cyrille Henry. 
 
- Temps de l’image animée
 
La notion de temps semble déjà naturellement présente par le mouvement que produit l’installation virtuelle en elle-même. En effet, le médium utilisé nous permet d’observer la pousse de la plante comme si le temps avait pris de la vitesse et qu'elle se présentait en accéléré (Timelapse). 
 
- Temps dans l’oeuvre, le cycle de vie
 
Le temps est suggéré par des graines virtuelles qui naissent, grandissent et meurent, imitant ainsi le déroulement de la vie et le cycle de la nature. Ce monde artificiel possède une durée paramétrable. La réalisation met en évidence un univers végétal où l’évaporation véloce des fleurs dans l’air marque l'aspect éphémère de l’existence. 
 
- Temps réel et temps virtuel
 
Par un jeu d’interactivité et une installation in situ à grande échelle, les mouvements réels du spectateur font progresser des fleurs qui croissent et se développent. Le temps virtuel (le mouvement de l’oeuvre) rencontre le temps réel (le mouvement physique de l’humain) et un dialogue se crée sur ce qui se passe dans l’ici et le maintenant. 
 
- Temps et l’après-temps
 
Lorsque la plante meurt, elle engendre des variations, des mutations, des proliférations de formes et des transformations. Les Fractal Flowers offrent aussi la possibilité aux collectionneurs d’acheter des graines virtuelles, questionnant ainsi le déplacement de l’oeuvre et l’existence virtuelle qui est sans cesse renouvelée.
 
Fractal Flowers, 2014, Installation de réalité virtuelle générative et interactive, Exposition Paradis Artificiels, Musée d'art moderne de Céret, Céret, France
MIGUEL CHEVALIER / FORME

L'œuvre de Miguel Chevalier est souvent caractérisée par une exploration de la relation entre l'art et la technologie, et de la manière dont la technologie peut être utilisée pour créer de nouvelles formes visuelles. Dans ce contexte, la notion de forme est centrale dans son travail, car l'artiste s'intéresse à la façon dont celle-ci peut être transformée, manipulée et créée par la technologie.

Interactives, les oeuvres de Miguel Chevalier permettent aux spectateurs d'agir sur la forme même dans un jeu de perpétuelle évolution. Dans certaines de ses œuvres, comme dans Fractal Flowers, il utilise des algorithmes mathématiques afin de générer des motifs qui évoquent des formes naturelles comme les fleurs et les feuilles, mais qui dans le même temps, assument totalement leur artificialité. Dans d'autres œuvres, comme Pixels Liquides, il crée des formes abstraites qui peuvent évoquer des phénomènes naturels comme l'eau en mouvement.

Dans ces deux exemples, la notion de forme est remise en question, car les formes créées ne sont ni totalement naturelles ni totalement artificielles, mais plutôt un mélange des deux. En utilisant la technologie pour créer des formes qui évoquent la nature, Chevalier interroge et explore la façon dont ces deux notions peuvent coexister dans un même objet.

Pixels liquides, 2011, Installation de réalité virtuelle générative et interactive, Festival La Novela, Musée d'art Moderne et Contemporain - Les Abattoirs, Toulouse, France
La PARTIE 1 de la newsletter consacrée aux notions de corps, espace, matérialité et outil est accessible dans le lien suivant.
Site internet académique
Twitter
Suivez-nous sur les réseaux sociaux
Newsletter éditée par le pôle de compétences arts plastiques de l'académie de Normandie

Pôle de compétences numériques

Partenaires